La première Amap du Bénin nourrit déjà 300 familles. Son fondateur nous raconte
Edgar Déguénon a lancé en 2008 l' Amap Bénin. Les premiers paniers touchèrent 40 ménages expatriés. Aujourd’hui, 300 familles dont 200 béninoises en bénéficient, et des centaines sont en liste d'attente.
Pourquoi développer les circuits-courts en Afrique de l’Ouest ?
L'une des raisons de l’insécurité alimentaire en Afrique de l'Ouest est la perte de confiance des agriculteurs en eux-mêmes et leur complexe de "sous-métier".
Les paysans baissent les bras parce qu'ils ne vivent pas bien de l'agriculture. Le rapport de force dans les filières agricoles leur est largement défavorable. Ce sont les acteurs en amont (fournisseurs d'intrants…) et en aval (commerçants grossistes et détaillants…) qui profitent le plus (spéculation).
La vente en circuit court permet aux paysans de récupérer une partie de la plus-value, et aux consommateurs d’accéder à des produits fermiers à moindre coût.
Pourquoi une Amap plutôt qu’un autre modèle de circuit court ?
Le principe est de créer un lien direct entre paysans et consommateurs, qui s'engagent à acheter la production à un prix équitable en payant d’avance. Ensemble, ils définissent la diversité et la quantité de denrées (fruits, légumes, œufs, fromage, viande...) à produire pour la saison.
La diversité permet de consommer des aliments variés et de limiter les risques dus au climat et éventuels problèmes sanitaires. Le maraîchage périurbain occupe à plein temps toute l’année, ce qui limite l’exode rural.
Les producteurs sont-ils intéressés par le projet ?
Les circuits courts permettent aux agriculteurs de récupérer de la plus value sur leur production, de disposer d’un minimum de fonds de roulement pour financer leurs activités et de sécuriser leurs revenus. Et comme ses ventes sont assurées, l’agriculteur peut se consacrer à la qualité de sa production.
Qu’est-ce qui différencie les produits de l’AMAP sur le marché ?
Les premières certifications SPG (Systèmes participatifs de garantie), qui associent étroitement les consommateurs, interviendront en septembre-octobre 2013. Certifier les produits est important pour distinguer le marché conventionnel de celui du bio. La transformation et l’amélioration de la présentation des produits facilitent aussi la vente.
Quel est le profil de vos clients ?
Les 20 premières familles de consommateurs étaient des expatriées ou des couples mixtes. Comme le concept d’AMAP n’existait pas au Bénin, cela a facilité le démarrage. Aujourd’hui, on compte un tiers de familles expatriées pour deux tiers de familles béninoises (classe moyenne). Le prix unitaire hebdomadaire des paniers et colis varie de 1200 à 9 500 FCFA selon l’option de choisie.
Comment toucher plus de béninois ?
Cela suppose de changer les habitudes alimentaires en sensibilisant à la consommation de fruits, légumes et viandes. Aujourd’hui ils sont chers car il y a beaucoup d’intermédiaires, du coup les béninois en prennent peu au repas.
Que faites-vous pour les sensibiliser ?
On essaie de développer des visites sur site et des activités pédagogiques. Nous avons fait des conférences de presse et des spots publicitaires sur les chaines de radio et de télévision nationales. Nous avons aussi travaillé avec des relais dans les écoles, les ministères, le bouche-à-oreille mais aussi les magazines. [...]
Propos des 18 août et 5 décembre 2011 et 31 octobre 2012, édités par Justine Mounet le 24 juillet 2013. Photos © Hortitechs.
Pour creuser le sujet :
Fiche innovation, "Paniers paysans et certification participative", 2014
Information, En Afrique, les produits locaux réinvestissent les marchés, 2012
Film, AMAP Bénin, 2013
Film, Cultures en transition, 2012 (présenté au Festival ALIMENTERRE 2013)
Étude, Répondre aux défis du XXIème siècle avec l’agroécologie : pourquoi et comment ?, 2013