Afrique de l'Ouest : " Si on ne protège pas nos économies ne serait-ce qu'un temps, jamais nous n'émergerons "

Étude/Synthèse/Article
Langue(s) : Français
Thématiques : Commerce international

Le vice-président du Réseau des organisations paysannes, Ibrahima Coulibaly, n'est pas content de la tournure que prennent les négociations pour la mise en place du Tarif extérieur commun (TEC) de la Cedeao. Pour lui, la société civile, notamment le ROPPA, qui était impliquée jusque-là est mise à l'écart alors que les enjeux sont très importants pour l'agriculture africaine. Le point d'achoppement reste le niveau de protection pour le riz et le lait local.

« Le Pays » : Qu'est-ce qui dérange le monde paysan à l'état actuel des négociations sur le TEC de la CEDEAO ?

Ibrahima Coulibaly : Ce qui nous pose problème, toutes les populations et aux économies africaines, c'est que notre TEC est parmi les plus bas du monde. Ni l'agriculture ni nos industries ne sont protégées. De notre point de vue et cela tous les économistes vous le confirmeront, un pays qui ne protège pas son économie ne peut jamais prospérer. Non seulement, nous ne sommes pas protégés et nos autorités sont en train de négocier des accords de libre échange pour être en concordance avec les accords de l'OMC. Les secteurs productifs devraient être consolidés avant, et pour le faire, il faut les protéger avant d'aller à cette ouverture. Pour nous, ce qui se passe est inacceptable.

Les négociations sont en cours et, tôt ou tard, il faudra bien signer. Quel accord serait juste pour vous ?

L'accord juste est cet accord qui permettra aux producteurs de riz du Sourou et de l'office du Niger de pouvoir cultiver leur riz, de le vendre et d'en vivre dignement. C'est l'accord qui permettra de consommer le riz dans l'année où il a été récolté, c'est-à-dire un riz de bonne qualité. C'est cet accord qui permettra à l'éleveur de pouvoir disposer de bêtes adaptées à la production de lait, de pouvoir investir pour produire plus et avec des équipements de collecte et de pasteurisation adéquats pour être vendus sur place.

Concrètement, voulez- vous une plus forte taxation à l'importation du riz et du lait qui font la concurrence à nos filières locales ?

C'est cela. Tout le monde l'a déjà fait, pour être conforme avec les objectifs de la politique communautaire. Mais je voudrais tout de suite rassurer les consommateurs que nous ne sommes pas contre eux parce que le producteur est également un grand consommateur. Nous ne demandons pas une augmentation des prix à la consommation. Si on ne protège pas nos économies ne serait-ce qu'un temps, jamais nous n'émergerons. [...]

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