L'Union européenne reconfigure la carte de l'Afrique
Après 12 ans de laborieuses négociations, l'UE a conclu en 2014 des accords de partenariat économique (APE) avec 3 régions d'Afrique subsaharienne. Mais le contenu des accords, comme la manière dont ils ont été conclus, suscite de nombreuses critiques, sur les deux continents.
Photo : Des industriels britanniques et le premier ministre David Cameron discutent de l'avenir des accords de libre-échange.
Quelques 44 pays d'Afrique sub-saharienne sont liés à l'UE par les nouveaux accords, régionaux ou bilatéraux conclus durant l'année. L'évènement est important pour l'Afrique.
L'UE est en effet le premier partenaire commercial de l'Afrique de l'Ouest, le premier fournisseur de l'East African Community (EAC) et le premier client de la Communauté économique pour le développement de l'Afrique australe (SADC), comme en témoigne l'infographie ci-contre.
Les pays africains ont été mis au pied du mur par le Commissaire européen au Commerce sortant, Karel De Gucht, qui averti que ceux qui ne conclueraient pas d'accord avant le 1er octobre 2014 tomberaient sous un régime plus contraignant d'accès au marché européen. Le secteur de l'horticulture et des fleurs qui emploie 500 000 personnes au Kenya s'est retrouvé sous la menace d'une hausse des tarifs de 10 % à l'entrée sur le marché européen. Début octobre, alors que Nairobi montrait encore des réticences, les premiers licenciements survenaient dans les plantations et les usines. Le Kenya a mis fin à sa résistance et l'UE a obtenu que l'EAC s'engage à éliminer ses droits de douane sur 80 % des lignes tarifaires en 15 ans.
Les Ouest-Africains ont quand à eux 20 ans pour ouvrir leur marché à 75 %. Côté face, l'Afrique de l'Ouest se définit comme une économie émergente de 300 millions d'habitants décidée à attirer les investisseurs. Côté face, la baisse des droits de douane aura un impact négatif sur les budgets des pays de la Cedeao. Selon l'économiste David Laborde de l'International Food Policy Research (IFPRI) de Washington, les recettes fiscales pourraient baisser de 30 %. Consciente du problème, l'UE a promis une aide de 6,5 milliards d'euros.
La Cedea importe principalement des voitures, des produits chimiques et des produits manufacturés, tandis que l'UE importe des matières premières (pétrole minerais, café, cacao, bananes, ...) En outre, des produits concurrentiels (céréales, farines, huiles végétales et légumes) sont exclus de l'accord dans la première phase d'application ; et la réduction des taxes à l'importation va réduire les coûts pour les industries africaines, plaide-t-on à la Commission.
Selon les simulations faites par l'IFPRI, dans tous les cas de figure, les exportations européennes vont augmenter et les effets positifs de croissance, enregistrés du côté de la Cedeao au départ, vont décroître à mesure que leur marché s'ouvre aux produits européens. "Plus on libéralise les produits qui sont compétitifs avec le production locale, plus l'effet est négatif", avertit Fatou Cissé du Consortium pour la recherche économique et sociale de Dakar. Selon elle, après une baisse de la pauvreté les premières années, on assistera ensuite à une augmentation de cette pauvreté.
Creuser le sujet :
- Etude, Accords de partenariat économique et agriculture : quels enjeux pour l'Afrique ? 2014
- Brève, L'Afrique de l'Ouest pourrait ouvrir son marché à l'UE dès 2014, 2014