Lait, commerce et développement au Sahel

Étude/Synthèse/Article
Langue(s) : Français
Thématiques : Elevage, Commerce international

Cette étude du Cirad fait la synthèse des connaissances disponibles sur les impacts socio-économiques de ce nouveau produit à destination de l'Afrique que constitue le "lait réengraissé". En particulier, elle les compare avec ceux de la filière lait local ouest-africaine.

Nouveau produit à destination du marché africain

Depuis 20 ans, les politiques commerciales des pays ouest-africains favorise l'importation de poudre de lait européen à bas prix. Mais depuis 10 ans, c'est un nouveau type de produit qui est importé de plus en plus massivement : des mélanges de poudre de lait écrémé et de graisse végétale en poudre. Ces "mélanges MGV" proviennent en grande partie de l'UE (Irlande, Pays-Bas, Pologne, Belgique, France). Ils apparaissent particulièrement efficaces pour fournir aux industries une matière première bon marché et répondre à la croissance rapide de la demande. La consommation moyenne par habitant a pu se maintenir à 20kg/an malgré l'urbanisation rapide. Et des emplois européens ont pu être sécurisés dans le cadre d'une stratégie de conquête de marché à l'export.

La tradition laitière au Sahel : perte d'emplois, perte de qualité

Le rôle de l'élevage ouest-africain (autant de têtes de bétail que dans l'UE) dans la création d'emplois  a été complètement oublié. Des millions de familles produisent du lait dans la région mais seulement 20 000 participent à l'approvisionnement des laiteries. Le lait est largement autoconsommé, troqué, vendu directement. La part du lait collecté est de seulement 1 à 7 % selon les pays. Et ce recours à une matière première importé bon marché nivelle par le bas la qualité des produits laitiers consommés en Afrique de l'Ouest. D'autant que l'étiquetage est source de confusion et peu de consommateurs savent ce qu'ils achètent réellement. La région est pourtant riche d'une culture laitière pastorale avec des produits et savoir-faire aujourd'hui sous-valorisés.

Un contre-sens climatique et environnemental

Les modes de production extensifs ou semi-extensifs propres à l'élevage pastoral sont particulièrement intéressants pour réduire l'impact carbone du secteur laitier, préserver la biodiversité et limiter la déforestation. Les systèmes de collecte de lait local qui concernent aujourd'hui une vingtaine d'industrie et environ 300 minilaiteries dans la région montrent d'ailleurs que ces modèles sont porteurs d'avenir. A contrario, les mélanges MGV, du fait notamment de l'incorporation d'huile de palme, ont des impacts néfastes sur l'environnement et le climat.

Les auteurs recommandent :

- de compléter les informations disponibles, notamment sur les produits à base de lactosérum (qui n'ont plus de protéines de lait, la tromperie du consommateur s'en trouve aggravée) ;

- de faire évoluer les nomenclatures et pratiques d'étiquetage ;

- aux firmes européennes de développer des démarches responsables ;

- aux Etats ouest-africains de cibler des mesures fiscales et d'incitation à la collecte du lait local.

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