Manger bio
Face aux dégâts causés par l'agriculture intensive, la France aurait intérêt à se convertir massivement au bio. Mais cela implique aussi de manger et faire ses courses autrement.
Plus des deux tiers des Français déclarent consommer des produits bio au moins une fois par mois. Aussi, l’agriculture biologique, qui ne représentait que 1,9 % de la surface agricole en 2002, en représente aujourd’hui près de 5 %. Cela reste en dessous de la moyenne européenne (6,2 %) et loin derrière l’Italie (12 %), la Suède (17 %) ou l’Autriche (21 %).
Mais la dynamique est entretenue par la forte demande des consommateurs (environ + 15 % en 2015 et + 21 % en 2016) et un vif intérêt des collectivités territoriales. Aujourd’hui, les trois quarts de cette demande sont couverts par la production nationale (les importations étant pour moitié des produits tropicaux).
Le bio est donc un facteur de développement local. Mais ses bénéfices sociaux et environnementaux sont fortement sous-estimés. Si les pollutions par les engrais azotés et les produits phytosanitaires coûteraient en effet chaque année entre 0,9 et 2,9 milliards d’euros [1], les externalités positives comme l’intensité en emplois (une intensité de près de 60 % plus importante que pour l’agriculture conventionnelle, selon l’Agence Bio [2]) et la santé publique ne sont pas intégrées dans les calculs des décideurs.
Enveloppe épuisée
Certes, en bio, les rendements sont moindres qu’en agriculture conventionnelle, de l’ordre de 20 % en moyenne mondiale, avec d’énormes disparités selon les cultures et les situations. Ainsi, en France, où les performances agricoles reposent largement sur l’usage de la chimie, les rendements d’un hectare de blé peuvent varier du simple au double selon qu’il est bio ou non. Mais si nous sommes à la traîne par rapport à l’objectif de 20 % de surface agricole utilisée en bio à atteindre en 2020, défini en 2009 lors du Grenelle de l’environnement, c’est surtout parce que les aides à la conversion demeurent trop faibles. « Les enveloppes prévues en 2017 pour aider les agriculteurs à passer en bio ont déjà été dépensées dans presque toutes les régions », note Stéphanie Pageot, présidente de la Fnab, la Fédération nationale de l’agriculture biologique.
La distribution de produits alimentaires bio fait néanmoins partie des rares secteurs économiques qui connaissent une croissance à deux chiffres. Selon l’Agence Bio, les ventes ont progressé de 22,5 % en 2016 dans les grandes surfaces, lesquelles sont aujourd’hui le premier lieu d’achat de ces produits en France. La progression est même supérieure à 23 % en moyenne chez les distributeurs spécialisés comme Biocoop, La Vie Claire ou Naturalia.
Mais comment s’y retrouver au milieu des différents logos, mentions et autres labels bio ? Et concrètement, où s’approvisionner ? C’est le plus souvent aux lettres AB que les consommateurs français repèrent les produits. Pourtant, ce symbole est une simple survivance : depuis 2009, c’est en effet un cahier des charges européen, assorti d’un autre logo (une feuille étoilée sur fond vert), qui définit les normes appliquées en agriculture bio et s’impose à tous les pays de l’Union européenne.