Pour ou contre la coexistence des systèmes agricoles
Le coexistence des modèles agricoles est prônée par de très nombreux responsables politiques. Pourtant, le sujet est controversé rappelle Transrural Initiatives.
Pour éviter la rupture, organiser la transition
Cofondateur du mouvement interrégional des Amap (Miramap), Jérôme Dehondt se définit comme "petit paysan diversifié en vente directe". Pour lui, prôner la co-existence des modèles revient à nier le fait que l'agriculture industrielle est une anomalie, développée par la volonté politique.
« Lorsque l’on aborde la question de la coexistence en agriculture, on oppose immédiatement deux modèles: un modèle industriel dominant contre un modèle alternatif innovant. S’il existe une homogénéisation des systèmes dans le modèle industriel, face à lui se développe une grande multitude d’alternatives et il me semble important de ne pas toutes les mettre dans le même sac. Par exemple, l’agriculture de précision, ou l’agriculture écologiquement intensive, sont certes des alternatives au modèle dominant en France, mais ne constituent pas un changement de paradigme en soi.
Rappelons que l’agriculture dite dominante, ne l’est que dans nos pays industrialisés, puisque ce qui continue de nourrir le monde, c’est encore la paysannerie. L’agriculture industrielle est pour moi une anomalie, développée par la volonté politique. Elle n’est performante à aucun point de vue : elle ne permet ni de nourrir les habitants de la planète, ni de préserver notre écosystème et encore moins de répondre aux enjeux sociétaux. Les suicides de mes collègues et la désertification de nos campagnes et ses conséquences en sont la preuve. Le système actuel est en faillite et les crises alimentaires et agricoles seront de plus en plus nombreuses. Pourquoi alors continuer à prôner l’existence d’un système voué à l’échec? Non, la coexistence n’est pas souhaitable, l’ensemble de l’agriculture doit être réorienté vers un système vertueux, dans les sillions des nombreuses initiatives existantes. Une agriculture paysanne, biologique, citoyenne et solidaire doit constituer un objectif politique clair et affirmé. Il faut pour cela faire émerger différents schémas de transition, comme le scénario Afterres 2050, et mettre en place au plus vite les politiques publiques accompagnant ces changements, en priorisant la réforme de l’enseignement agricole et l’accompagnement à l’installation. Prôner la coexistence c’est refuser de voir la faillite annoncée et nier à la population agricole une transition qui sera d’autant plus rude si elle n’est pas anticipée. »
Téléchargez le bon d'abonnement à Transrural Initiatives
Creuser le sujet :
- Témoignage, Jean-Christophe Kroll : "Plaider pour la co-existence des modèles de production est politiquement très commode", 2013
- Etude, Afterres 2050, scénario consolidé en 2016
- Synthèse, Transition agroécologique : comment dépasser les obstacles à la diffusion des pratiques ? 2013