Les agricultures familiales du monde : le Mali
Dans la perspective de l’Année Internationale de l’Agriculture Familiale, le Cirad a été mandaté pour analyser les caractéristiques des agricultures familiales du monde avec des études dans 9 pays dont le Mali.
La capacité de l’agriculture familiale à contribuer efficacement à faire face aux enjeux de sécurité alimentaire est controversée. Au Mali aussi, le modèle de développement agricole a été débattu sous l’impulsion des organisations paysannes, autour notamment de l’attribution de terres à des investisseurs avec l’expulsion de familles dans l’Office du Niger, de la crise cotonnière et de la nouvelle Loi d’Orientation Agricole (LOA). L’agriculture malienne est structurellement le fait de petits producteurs. La plupart des organisations paysannes se retrouvent dans les actions de la CNOP qui défend l’agriculture familiale dans l’élaboration des politiques.
La LOA de 2006 reconnaît deux types d’exploitations agricoles : les exploitations familiales et les entreprises. Avec cette reconnaissance explicite des exploitations familiales agricoles, l’Etat malien emboitait le pas des organisations paysannes de la sous-région qui, depuis le début des années 2000, font de l’agriculture familiale le thème central de leurs analyses et revendications.
Mais pour une partie de l’administration et de la classe politique malienne, la croissance agricole et la sécurité alimentaire passent par le développement d’exploitations agro-industrielles intensives en intrants. L’Etat a donc continué à favoriser l’installation de grandes entreprises en leur attribuant de vastes superficies de terres avec un accès privilégié à l’eau et sans réelle contrainte. Au contraire, les exploitations familiales peinent à obtenir quelques hectares et sont assujetties au paiement d’une forte redevance hydraulique. Cette différence de traitement de la part du gouvernement révèle une perte d’intérêt pour l’agriculture familiale, pourtant à l’origine du dynamisme de la production agricole dans la zone de l’Office du Niger (Burnod et al, 2011).
En 2008, l’Etat engageait un programme d’appui à la culture du riz, l’Initiative Riz, qui visait une hausse de 50 % de la production via la subvention des intrants et des équipements. Les premiers résultats annoncés étaient spectaculaires mais le maintien d’un haut niveau de prix du riz à la consommation a engendré un débat sur leur réalité. Les politiques d’incitation ne ciblent pas spécifiquement un type d’exploitation et elles bénéficient le plus aux grandes exploitations spécialisées. Pour Alexis Roy (L’Initiative riz au Mali : une réponse politique à l’insécurité alimentaire ?) « force est de constater que l’enjeu du partage des rentes favorise la conjonction des intérêts d’un nombre restreint d’acteurs ». La mise en œuvre des politiques agricoles est pénalisée par l’enlisement de la réforme de décentralisation au Mali. Le transfert des pouvoirs vers les collectivités locales n’a pas avancé comme prévu et on note toujours une faible participation des populations aux processus de prise de décision au niveau local.
Les exploitations familiales maliennes ont pourtant un besoin urgent d'une politique agricole ambitieuse. Leur intégration aux marchés reste très faible et les innovations sur la valorisation des produits sont à l'état embryonnaire.
Creuser le sujet :
- Voir l'étude complète sur l'agriculture famililale au Mali
- Voir le résumé de l'étude complète du Cirad Les agricultures familiales du monde
- Etude, Mali : quels modèles économiques pour les projets d'investissements au Mali ?, 2013