Les enjeux et les marges de manœuvre de la CEDEAO face aux défis des négociations agricoles
L'Afrique de l'Ouest est en fait un grand PMA qui connaît un déficit alimentaire croissant. Avec un PIB annuel per capita d’environ 500 $US, contre 1170 $US en moyenne pour les pays en voie de développement, la zone est en effet parmi la plus pauvre du monde. Par ailleurs, en écartant les produits tropicaux destinés à l'exportation (cacao, café, etc..) et les produits agricoles non alimentaires, le constat d'un déficit alimentaire croissant de la CEDEAO s'impose, il a été multiplié par 3 de 1995 à 2003. Pour envisager un mode de développement qui contribue de manière durable à la satisfaction des besoins alimentaires de la population, il est nécessaire de réduire la dépendance alimentaire et d'inverser cette tendance.
Cette étude a pour objet d'identifier les enjeux et les marges de manœuvre qui s'offrent aux pays de la CEDEAO pour mieux adapter les instruments économiques aux objectifs de la Politique agricole et à la mise en place prochaine d'un APE avec l'UE. L'analyse des avantages et désavantages comparatifs de la CEDEAO, souligne que les céréales (froment de blé, le riz semi blanchi, le riz en brisures), les sucres, le lait (lait en poudre et granulé), et les préparations alimentaires (à base de concentré de café et aliments pour enfants à base de lait) ont clairement une contribution négative au solde.
Globalement ce sont les relations commerciales avec l'UE qui présentent la contribution la plus avantageuse au solde de la balance commerciale alimentaire de la CEDEAO. Cette contribution est également favorable sur le marché indien. En revanche, les relations avec L'Asie et la Chine, les USA - Canada et l'Amérique du Sud, ont une contribution négative au solde alimentaire.
La mise en place d'un Tarif extérieur commun (TEC) qui soit mieux ancré à la politique agricole de la CEDEAO serait une réponse crédible face à la baisse des prix des importations et à la croissance du déficit alimentaire. Pour garantir une réduction de la dépendance alimentaire, il s'agit surtout de mettre en avant les conditions de l'intégration régionale. Le bilan de cette intégration, sur le plan de la production et des échanges alimentaires, est à ce jour négatif. La part des échanges intra-régionaux relativement au total des importations de produits alimentaires ne cesse de diminuer. Les entraves à cette construction régionale sont à chercher du côté d'une protection extérieure actuellement insuffisante pour permettre la mise en place d'une préférence communautaire. À cela vient s'ajouter le fait que la libre circulation des biens au sein de la zone n'est pas complètement assurée. Cette orientation est sans doute un défi lancé aux donateurs (Banque Mondiale) ou aux organismes d'appui des programmes d'ajustement structurels (FMI) qui souhaitent que le TEC soit le moins contraignant possible.
L'inquiétude, certainement partagée par les décideurs de la CEDEAO, est ici que le niveau de taxation des produits alimentaires de base renchérisse les prix sur le marché domestique et réduise le pouvoir d’achat des ménages, ce qui aurait une incidence également sur la pauvreté. L'objectif premier étant de répondre à l'importance de la pauvreté urbaine qui se développe en Afrique de l'Ouest. Toutefois cette voie qui milite pour un TEC peu contraignant ne fait pas la démonstration d'une réduction de la dépendance alimentaire, ni d'une reconquête des marchés locaux de production alimentaire, ni même d'un schéma vertueux de développement durable.