“Relever le défi des MNT, c’est adopter une vision à long terme, à l’encontre des politiques actuelles“
Entretien avec Stéphane Besançon, directeur de l’ONG Santé Diabète, basée au Mali et active au Burkina Faso.
Quelle est la gravité du problème quand on évoque les MNT ?
En Afrique, quasiment un adulte sur cinq est touché par l'hypertension et quasiment 50 % des patients souffrent à la fois d’hypertension et de diabète. Cette charge diabète/hypertension est une charge de morbi-mortalité extrêmement forte pour les pays d’Afrique de l’Ouest, avec toute la problématique des complications, qu'elles soient rénales ou cardiovasculaires, ce qui fait peser une charge à la fois sur la santé mais aussi sur l'économie puisque toutes les complications coûtent extrêmement cher à soigner. Le diabète est à l’origine de maladies cardiovasculaires, qui causent des accidents vasculaires cérébraux (AVC) chez des populations très jeunes. La moyenne d’âge des AVC est autour de quarante-cinq ans en Afrique, ce qui est beaucoup plus jeune qu'en Europe ou aux États-Unis. Ce sont des gens dans la force de l’âge qui sont touchés !
Vous aviez signé une tribune qui titrait « En Afrique, le diabète et les maladies cardiovasculaires tuent plus que le Sida ». Avez-vous, depuis, observé une réelle prise de conscience des institutions et des politiques du drame qui est en train de se jouer ?
On est passé du désert et du silence total à une prise de conscience, mais elle est encore théorique. Il y a des rapports dans tous les sens, les MNT montent très fortement sur l'agenda, tout le monde dit que cela devient la priorité, sauf qu’en réalité les financements ne sont pas du tout là. L'idée est d'éviter le chaos plus tard et d'avoir une approche systémique. Nous faisons de la prévention aujourd'hui pour des résultats dans trente, quarante, voire cinquante ans. Or, quand vous dites aux politiques qu’il faut investir aujourd'hui pour voir des résultats dans quarante ans, ils préfèrent s’occuper de ce qui va leur apporter du crédit à court terme. C'est une question politique plus large, les MNT sont un vrai point d'ancrage pour cette réflexion.
Quelles sont les solutions pour agir au mieux ?
Le diabète est multifactoriel. Ce n’est pas juste une question de santé, il s’agit aussi d'urbanisation, de taxation, d’industries alimentaires, ce qui rend la situation particulièrement complexe. Mais nous pourrions prévenir la majorité des diabètes de type 2 si les personnes à facteurs de risque étaient dépistées plus tôt puis conseillées et accompagnées pour éviter que ces maladies se développent. Quand tous les facteurs de risque s’additionnent, à savoir faible activité physique, mauvaise alimentation, surpoids, obésité, on sait que les maladies surviennent. Il est important de dépister les facteurs de risque très tôt pour mettre en place les politiques de prévention.
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Cet article est extrait de la publication L'espoir au-delà des crises, solutions ouest-africaines pour des systèmes alimentaires durables, 3ème tome d'une série d'ouvrages collectifs édités par le programme Pafao.