Togo : un label pour la viande locale de lapin
Dans le Nord du Togo, les deux ONG, Avenir de la jeune fille de Dapaong (AJFD) et l’Organisation régionale pour la promotion sociale et agricole (Orepsa) promeuvent une viande de lapin locale et accessible à toutes les bourses. Il s’agit de reconquérir le marché face aux viandes congelées importées, parfois impropres à la consommation. Entretien avec Sougouli Bohm et Pascaline Toulouse.
Quels sont les problèmes liés à l’importation de la viande congelée ?
Le plus gros souci est d’ordre sanitaire. Cette viande vient des pays occidentaux par voie maritime. Les services de l’État contrôlent les containers au port d’arrivée mais il n’y a plus aucun suivi sur le territoire par la suite. Cette viande est énormément consommée par les plus pauvres car elle est très bon marché. En milieu rural, il y a peu de relais d’information sur les questions sanitaires et les consommateurs n’ont pas conscience des dangers encourus. En revanche, ceux qui sont informés et qui ont davantage de moyens achètent la poule ou la pintade locale.
Comment faites-vous valoir les qualités de la viande de lapin ?
Nous organisons des journées portes ouvertes au centre communautaire de Dapaong comme à la cantine Vital Lapin, pendant lesquelles nous informons sur les valeurs nutritionnelles de la viande de lapin. Nous avons un partenariat avec la radio locale, la Radio communautaire des Savanes, qui diffuse des spots publicitaires quelques jours avant l’évènement puis couvre les portes ouvertes pour son journal d’information. Grâce à cette médiatisation, les gens s’intéressent de plus en plus à la viande de lapin. Dans les banlieues de Dapaong, la viande de lapin fumée a beaucoup de succès. Notre stratégie est de parvenir à la vendre en-dessous du prix de la viande importée, un morceau coûte seulement 1 000 FCFA et le lapin entier, 2500 FCFA.
La viande braisée de lapin est un autre segment de marché, elle concerne plutôt les nantis, les fonctionnaires, qui fréquentent la cantine Vital Lapin.
Comment se déroule la commercialisation des produits ?
La cantine Vital Lapin est gérée par un cuisinier professionnel qui propose de la viande braisée sur commande. La cantine propose également des cours de cuisine pour les femmes qui souhaitent valoriser au maximum la viande grâce à des mets à base de lapin.
Par ailleurs, les productrices de la coopérative Vital Lapin vendent elles-mêmes la viande au grand marché de la ville et de deux points de vente existants, des grilleurs de viande. Mais la plupart des lapins sont achetés par des collecteurs qui connaissent bien les commerçants intéressés et peuvent stocker la viande. Ils transportent les produits bruts vers les points de vente pour la transformation et vers les restaurants qui préfèrent les cuisiner à leur guise. Il n’existe aucun contrat formel entre les collecteurs et les productrices.
Un autre circuit qui s’est développé est la vente ambulante : une dizaine de femmes de Dapaong proposent des plats cuisinés à base de lapin (soupes, etc.) aux clients de « cabarets », des lieux où les habitants aiment se retrouver pour boire le tchoukoutou, la bière locale à base de mil ou de sorgho.
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Propos recueillis en décembre 2017 et juillet 2018 par Alexandra Merli (CFSI) et Murielle N’dah (CFSI)
Pour creuser le sujet :
- Témoignage, Bénin : Les produits du terroir n'ont pas dit leur dernier mot, 2014
- Film, Bénin, poulet morgue, 2014
- Site d’Élevages sans frontières www.elevagessansfrontieres.org/
- Fiche thématique Élevage, viande, lait, 2018