Au Burkina Faso : warrantage pour des échanges commerciaux équitables
La Confédération paysanne du Faso (CPF) a développé un mécanisme de warrantage - crédit-stockage - des céréales et légumineuses, pour que les producteurs gèrent mieux leurs stocks. Grâce aux bons résultats enregistrés, les acteurs pratiquant le warrantage se sont diversifiés. Depuis 2017, les producteurs d’oignons expérimentent le mécanisme. Rencontre avec Issoufou Porgo, secrétaire permanent de la CPF.
Quelles sont les raisons de la mise place du warrantage ?
Dans leur quête de ressources financières pour satisfaire leurs besoins, les producteurs bradent leur production juste après les récoltes auprès des commerçants, qui les stockent et, plus tard, spéculent sur les prix afin de dégager d’importantes marges.
Par exemple, dans le cas de l’oignon, le pic de l’offre sur le marché s’observe en mars/avril, et pendant cette période le produit est au plus bas de sa valeur marchande. Les producteurs écoulent la quasi-totalité de leurs stocks, et sont donc obligés de recourir aux marchés pour acheter les mêmes produits pour leur autoconsommation, mais à des prix supérieurs à leur pouvoir d’achat. Cette situation les expose à une insécurité alimentaire. Dans ces conditions, le warrantage est un moyen efficace pour améliorer la gestion des stocks des producteurs, tout en leur garantissant des revenus meilleurs.
En quoi consiste concrètement votre mécanisme ?
Dans un premier temps, le groupement met en place un comité de gestion du warrantage constitué d’environ cinq personnes qui suivront plusieurs cycles de formation. La disponibilité d’une infrastructure de stockage est une condition indispensable et les groupements que nous appuyons se mettent à la recherche de ces infrastructures, avec notre appui. Nous procédons à des travaux de réfection pour répondre aux normes des magasins de stockage. Signalons également l’appui de certains de nos partenaires pour la construction de nouveaux bâtiments.
Magasin de warrantage du village de Biforo © CPF
Les producteurs indiquent lors du stockage la quantité qu’ils prévoient pour la vente et celle qui servira à leur consommation personnelle. Les agents de l’institution monétaire et financière (IMF) en vérifient l’effectivité et procèdent au montage du dossier de demande de crédit, en tenant compte de la valeur des produits stockés. Le crédit est ensuite décaissé au profit des membres des groupements. Puis, le comité de warrantage et l’IMF (laquelle détient une clé d’accès aux magasins de stockage), organisent de façon périodique, des visites conjointes de suivi. Le comité de gestion est chargé de suivre l’évolution des prix et de prospecter des clients. Lorsque le comité repère une opportunité, il en informe le groupement. Le client règle son achat auprès de l’IMF qui autorise le déstockage.
Les revenus des ventes servent à rembourser le crédit contracté par le groupement ; une partie est allouée aux frais de gestion et de stockage et l’autre est distribuée entre les membres du groupement selon la quantité des stocks faits par chacun.
Quels sont les produits sur lesquels porte le warrantage ?
Le mécanisme de warrantage de la CPF a démarré en 2009 avec les céréales et les légumineuses, notamment le maïs, le petit mil, le sorgho, le riz, le haricot (niébé) et l’arachide. Le maïs prédomine car il représente environ 70 % des stocks constitués pour le warrantage. Depuis 2017, nous avons intégré l’oignon dans le mécanisme avec trois cents producteurs de deux régions (Nord et Centre Ouest) du pays. [...]
Propos recueillis en février 2018 par Yvon Saroumi (Inter-réseaux)