Les filets de protection sociale en Afrique Subsaharienne : quelles implications sociales et politiques ?
Ce rapport synthétise une journée d’étude organisée par l’Iram en juin 2019 portant sur les implications sociales et politiques des filets de protection sociale en Afrique subsaharienne et la manière dont ils sont construits politiquement et acceptés au niveau des populations locales et de l’Etat.
Depuis une vingtaine d’année, l’Afrique subsaharienne a connu un développement rapide des politiques et des programmes de protection sociale. Au départ, ces programmes visaient la sécurité alimentaire et nutritionnelle. Aujourd’hui, elle englobe plusieurs domaines : lutte contre la pauvreté, vulnérabilité, promotion sociale et économique des populations. Les filets de protection sociale sont affectés sans contribution des populations, à la différence de l’assurance sociale.
Un développement des politiques de filets sociaux en plusieurs temps : l'exemple du Mali, du Niger et du Sénégal
Tous les pays d’Afrique de l’Ouest n’ont pas le même avancement en ce qui concerne les constructions de leurs politiques de filets sociaux. Au Mali et au Niger par exemple, ces aides participent à la sécurité alimentaire et nutritionnelle et sont principalement apportées par des partenaires extérieurs comme la Banque Mondiale. Au Sénégal, la protection sociale est devenue en 2012 une priorité. Les financements proviennent de l’Etat et les programmes mis en place se développent autour de la question de la lutte contre la pauvreté et sont destinés aux populations les plus vulnérables. Pour chaque cas, il convient de prendre en compte les contraintes socio-politiques pouvant compliquer la mise en œuvre des politiques de protection sociale. Par exemple, le Mali et le Niger sont marqués par des contextes sécuritaires tendus, empêchant l’accès à certaines zones ou limitant le regroupement de populations.
Les techniques de ciblages des populations bénéficiaires sont-elles réellement adaptées ?
Afin de déterminer les populations « à aider », des techniques de ciblage ont été élaborées :
- ciblage catégoriel, selon la géographie (taux de pauvreté/insécurité alimentaire/malnutrition/...du lieu de vie) ou la démographie (femmes enceintes, enfants de moins 5 ans, handicapés,…) ;
- ciblage ménage, pouvant être communautaire (en adéquation avec les besoins et les réalités de la zone ou de la communauté concernée) ou par technique statistique P.M.T (pour Proxy Means Test, prend en compte le bien-être des populations ciblées) ;
- l’auto-ciblage par auto déclaration (technique la moins couteuse et la plus facile à mettre en place).
Le ciblage est fortement critiqué en Afrique subsaharienne. Les règles et normes sont perçues comme imposée de l'extérieur, sans correspondre à la situation du pays ou de la communauté. A titre d’exemple, « la définition de la pauvreté selon des critères statistiques ne correspond pas à l’approche perçue localement », c’est-à-dire que les populations catégorisées pauvres car sans argent, peuvent avoir un tout autre statut au sein de leur communauté, en raison d’un fort capital social. Il est donc primordial d’adapter des méthodes de ciblage à chaque culture et communauté.
S’inspirer des solidarités existantes
Des mécanismes informels de protection sociale ont bien sûr toujours existé, indépendamment des Etats et des organismes d’aide. Ces mécanismes passent par des transferts monétaires, en nature (don de nourriture) ou en temps (de travail, de transports de malade,…). Les contours flous de ce type d’aide sociale compliquent le recensement des risques auxquels les ménages les plus pauvres peuvent faire face et donc l'accès aux aides en cas de choc. De plus, ces formes endogènes de protection sociale tendent à créer des déséquilibres relationnels entre les personnes bénéficiaires et aidantes mais également des situations de dépendances et de domination. Les formes informelles sont peu prises en compte dans les politiques de protections sociales alors qu’elles sont pourtant beaucoup plus adaptées aux contextes communautaires. Ces méthodes informelles et endogènes ne sont pas à minimiser. Elles représentent des réels champs d’innovation et sont encore étudiées par les chercheurs.
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Lire le rapport en français (48 pages)
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