Au Mali : soutenir une filière riz locale innovante
La zone Office du Niger est un périmètre de culture irriguée situé dans le delta intérieur du fleuve Niger. Il fournit 30 % du riz consommé au Mali. Le Syndicat des exploitants agricoles de l’Office du Niger (Sexagon), appuyé par SOS Faim, y a expérimenté un système de riziculture intensive (SRI). Retour sur cette expérience et les enjeux de la filière riz avec Christophe Brismé, responsable des partenariats au Mali et au Niger pour SOS Faim Belgique.
Qu’est-ce qui explique l’attractivité de la zone Office du Niger ?
Les cultures ne dépendent pas du climat grâce à un système d’alimentation en eau par gravité, donc sans frais de fonctionnement de motopompe. Cela rend la riziculture possible en contre-saison [saison sèche]. Les engrais y sont subventionnés. La zone produit plus de la moitié du riz malien.
Quels en sont les limites ?
Le rythme des aménagements agricoles dans la zone est inférieur à celui de l’accroissement de la population. De nouveaux arrivants s’installent. Comme la taille des familles s’accroît, la terre est partagée entre les enfants. Que ce partage soit officiel ou officieux, chaque famille a une parcelle de moins en moins importante. Et la disponibilité en eau dans la zone est de moins en moins garantie. L’Office du Niger ferme maintenant certains canaux en saison sèche.
Comment réagit le mouvement paysan ?
Sur le foncier, la difficulté touchant essentiellement les femmes et les jeunes, certaines organisations paysannes (OP) maliennes et leurs faîtières ont demandé qu’au moins 30 % des superficies nouvellement aménagées leur soient accordées. Mais la loi foncière de 2017 a finalement fixé à 15 % le minimum de terres nouvellement aménagées par l’État ou les collectivités territoriales devant être attribuées aux groupements et associations de femmes et de jeunes. Certaines OP en sont satisfaites, d’autres estiment que ce n’est pas suffisant.
Les femmes ont traditionnellement un accès facilité à la terre en contre-saison, pour cultiver du riz ou faire du maraîchage. Certaines organisations, notamment Faso Jigi et Fecopon, prônent d’ailleurs la diversification des productions grâce au maraîchage. C'est aussi une réponse au problème de disponibilité hydrique. Les paysans cherchent des cultures et des techniques moins consommatrices en eau. Cela vient conforter l’approche globale qu’a SOS Faim vis-à-vis de l’exploitation agricole qui doit être analysée dans son ensemble, et non filière par filière.
Vous prônez aussi le système de riziculture intensive (SRI)
Ce système nous semblait être la panacée : rendements supérieurs avec moins de consommation d’eau, en plus de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. En effet, dans la riziculture classique, le riz est cultivé dans une lame d’eau constante dans le sol, ce qui favorise le développement des bactéries qui décomposent les matières organiques en émettant du méthane, un gaz à effet de serre.
La technique du SRI consiste à repiquer des plants de riz à un stade précoce, en faisant des espaces plus importants (pour profiter pleinement des propriétés de tallage du riz), à apporter des engrais organiques et à faire varier la hauteur de la lame d’eau.
Aucune étude scientifique ne s’est penchée précisément sur la réduction effective des émissions avec la technique du SRI, mais l’hypothèse vient du fait qu’à partir du moment où la parcelle n’est plus constamment sous eau, on favorise le développement des bactéries aérobies qui absorbent des gaz à effet de serre. [...]
Propos recueillis en septembre 2017 par Marie Cosquer (CFSI)