Produire autrement - L'agronomie est prête... mais pas seule
Pour Thierry Doré, agronome et directeur scientifique à AgroParisTech, l'agronomie est mûre pour accompagner la transition vers d'autres modes de production agricole. Mais cette transition ne pourra avoir lieu sans un nouveau pacte entre agriculture et société.
Agir sur les trois forces qui font le système actuel
« Produire autrement » est devenu un slogan national. Peu nombreux sont ceux qui contestent qu’une transformation de l’agriculture est nécessaire. La plupart s’accordent sur le fait qu’il faut « changer de modèle ». Pour l’auteur, il n’y a pas un modèle unique actuellement en France, mais plutôt la conjugaison de trois forces motrices qui font le système : la spécialisation des exploitations, le recherche de hauts niveaux de productivité, l’artificialisation croissante des systèmes productifs (intrants de synthèse, mécanisation, sophistication de la sélection variétale). C’est en agissant sur trois dynamiques que l’on pourra modifier le système actuel.
Les leviers du changement identifiés depuis plus de 20 ans
« Produire autrement » est justement le titre d’un article signés en 1991 par deux agronomes, Jean-Marc Meynard et Philippe Girardin. S’appuyant sur des travaux antérieurs, ils mettent l’accent sur les trois dimensions nécessaires au changement : l’abandon du rendement comme le seul moyen d’évaluer les systèmes de production, l’agencement spatial des systèmes de cultures pour limiter leurs impacts, des diagnostics réguliers pour alimenter la boucle du progrès. Depuis, les travaux en agronomie ont été poursuivis dans ces directions. La transition passera donc par un retour à l’agronomie qui a intensivement étudié les interactions des agroécosystèmes en s’ouvrant à l’écologie et à la biologie depuis une douzaine d’années.
L’agronomie du territoire
La dimension territoriale de l’agronomie s’est aussi beaucoup développée. On comprend mieux aujourd’hui les interactions entre espaces cultivés et espaces non cultivés d’un territoire. Les relations entre les différents acteurs qui interviennent dans la gestion d’un territoire donné sont prises en compte pour imaginer des modes de gestion collectifs. Ces nouveaux champs de connaissances font appel à différentes disciplines : hydrologie, géographie, sociologie et écologie.
L’agronomie ne peut pas tout
En revanche, il n’appartient pas à l’agronomie de définir les objectifs à atteindre, ni de mettre au point les conditions économiques et sociales rendant viables les systèmes permettant d’atteindre ces objectifs. Cet ensemble relève de l’écriture d’un nouveau pacte entre l’agriculture et la société.
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Article de T. Doré, extrait de la revue PCM de l'Union des ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts, Agricultures et société, mars 2013