Alimentation scolaire et consommer local : les avancées
Le programme Pafao a soutenu plus de 20 projets d’alimentation scolaire issue de la production locale, sujet phare de plaidoyer pour de nombreuses organisations de la société civile. Au Bénin, Burkina Faso, Sénégal et Togo, des moyens additionnels sont déployés pour les appuyer dans leurs démarches. Fin 2024, la Coordination togolaise des organisations paysannes (Ctop) a tenu le 3ème atelier sous-régional sur ce thème avec la participation du Ghana qui rejoint ainsi la dynamique d’échange.
LE CONTEXTE TOGOLAIS : UNE LOI FORTE MAIS UN BUDGET MODESTE ET DES MICRO TRANSFERTS
Un millier d’écoles situées en zone rurale vulnérable sont pour le moment concernées pour près de 15 000 écoles existantes. Pour couvrir les besoins des 158 000 élèves pris en charge, il faudrait 3 milliards de FCFA. Or le budget actuel est de seulement 1 milliard de FCFA– le budget global de l’enseignement primaire et général est de 200 milliards – ce qui ne permet pas d’assurer les 172 repas par an par élève.
La loi a aussi institué un plancher de 40 % pour l’achat de vivres directement auprès des producteurs agricoles locaux sur la totalité des ressources financières allouées à l’alimentation scolaire. Pourtant, le fonctionnement actuel ne permet pas de connaître la provenance des produits achetés car les cantinières, les « mamans cantines », perçoivent de façon hebdomadaire des ressources pour leurs achats et leur rémunération et elles s’approvisionnent donc au jour le jour en petites quantités sur les marchés.
L’Anadeb mène des expériences pilotes d’approvisionnement direct des mamans cantines en produits achetés auprès des organisations paysannes (OP) locales. L’atelier est l’occasion de faire le bilan de celle menée sur la commune de Zio 4, à une cinquantaine de kilomètre de Lomé.
Pour les 16 écoles de Zio 4 concernées, près de 4 tonnes de maïs, plus de 6 tonnes de riz et près de 6 tonnes de haricots ont ainsi été achetés en 2023 auprès de l’Union cantonale des maïsiculteurs de Gapè centre. La généralisation de l’expérience pilote n’est pas possible selon l’Anadeb qui avance comme raison principale la hausse du coût unitaire du repas à 180 FCFA observée durant l’expérimentation. On peut faire l’hypothèse que cette hausse est surtout due au mauvais calendrier et à l’inexpérience de l’Union et des autres acteurs impliqués. Les expériences des autres partenaires en la matière sont à prendre en compte.
Les équipes de la CTOP et du CFSI avec les producteurs de l’Union cantonale des maïsiculteurs de Gapè centre ayant participé à l’expérience pilote en préparation de leur participation à l’atelier © CFSI
LES CANTINES DU PAM DANS LE NORD TOGO : DES APPUIS AUX PAYSANS INTEGRES AU DISPOSITIF
Le Programme alimentaire mondiale (Pam) permet actuellement le fonctionnement de 30 cantines scolaires dans la région des Savanes et 20 dans la région de la Kara. Le modèle est décentralisé (l’école achète elle-même les denrées). Des partenariats sont noués entre les Comité de gestion des écoles (Copgep) et les organisations paysannes identifiées puis appuyées (immatriculation, gestion, bonnes pratiques agricoles, conservation post-récolte, contractualisation, développement de liens de confiance avec les mamans cantines). Pour le Pam, une des difficultés majeures résident dans le fait que la majorité des paysans n’est pas affiliée à une OP dans ses zones d’intervention du Nord Togo qui sont particulièrement vulnérables. Le choix des écoles dans les zones vulnérables se fait plutôt en fonction de l’existence des infrastructures de base pour le service d’alimentation scolaire pour ne pas que les coûts d’aménagement absorbent tout le budget, et non en fonction des capacités des agriculteurs locaux à fournir les écoles.
Photos : Falaman Djanguenan du Pam et Adila Adjile de l’Agence régionale pour l’agriculture et l’alimentation (Araa), à droite. Le Pam comme l’Araa prévoient des appuis aux OP pour privilégier les achats locaux qui créent des revenus avec une stratégie de résilience alimentaire à long terme. © CFSI
La petite ONG Code Utile qui fait fonctionner 8 cantines a la même ambition d’approvisionnement local et d’appui aux paysans (en particuliers les paysannes, avec une approche participative et inclusive, et des formations en agroécologie) dans le cadre de projets pilotes de l’Araa. Code Utile a élaboré un guide pratique de « mise en place d’un modèle de gestion intégrée des cantines d’excellence ».
L’atelier s’est poursuivi avec les présentations des plateformes paysannes nationales des autres pays.
Au Bénin et au Burkina Faso, les achats aux organisations paysannes sont riches d’enseignements.
Au Ghana, le programme est conséquent mais souffre d’un fonctionnement par micro-achats et d’un manque de trésorerie.
Au Sénégal, une coalition très dynamique est à l’initiative d’un processus législatif.
Pour creuser le sujet :
- CFSI, L’alimentation scolaire en Afrique de l’Ouest – État des lieux 2023
- La page sur alimenterre.org du Réseau de promotion de l'alimentation scolaire en circuit court en Afrique de l'Ouest
- CFSI, Intensifier les commandes publiques en produits locaux, 2023
- Entretien, Au Bénin : Les organisations de producteurs plaident pour les produits locaux dans les cantines scolaires, 2023
- Etude, Faisabilité d’une expérience pilote : modèle de contractualisation directe OP-cantines dans la région de la Kara, Ilona Gordien, 2022